LES FJORDS DU SUD OUEST 2
Le Doubtfull Sound, de son nom maori «Patea », qui signifie « The Sound of Silence », le goulet du silence…
L’histoire a préféré retenir le nom donné par Cook: Doubtfull. Il avait approché ce fjord lors de son premier voyage, en 1770, mais n’avait pas voulu s’y aventurer, de crainte de ne pouvoir en sortir ; les moteurs n’existaient pas ! La cartographie de ces fjords sera établie presque un siècle plus tard, par le capitaine Stoke.
Nous y entrons doucement poussés par le vent d’Ouest et la confiance dans notre machine!
Un tour dans le Hall Arm, il fait si beau!
Nous voici à Deep Cove, le fond du Doubtfull Sound, à 45 kms de l’entrée.
Le corps-mort de Bill nous paraît mal placé, la dépression s’annonce sérieuse, c'est le cyclone Fehi qui nous arrive dessus. Nous prenons un autre corps mort plus inspirant. Un pêcheur vient nous voir et nous confirme que c’est du solide, son propriétaire a emmené son bateau à Bluff pour un mois, nous pouvons donc nous installer ! « Et quand vous serez à Stewart , prenez le mien, il sera libre ! il est devant le pub.. Je m’appelle Rastus, je suis de Stewart »… Plutôt sympa tout ça !
Le Doubtfull est depuis longtemps visité pour sa beauté, comme le Milford, bien qu’il soit plus compliqué d’accés; la route s’arrête au Lac Manapouri, qui se traverse sur un bac ; à Deep Cove un seul bâtiment: un gîte, utilisé par les écoles, « classes vertes », les kayakistes, les scientifiques, ou les techniciens de la centrale hydroélectrique. Cette installation hydroélectrique utilisant les eaux du Lac Manapouri a été construite en 1920 puis plusieurs fois transformée.
Le long des berges un ponton avec une pompe à gasoil, quelques bateaux de croisière-panorama et des bateaux de pêche, tous fermés. C’est curieux ces endroits où personne n’habite, on y vient dans un but précis, on en repart aussitôt. Pas de maisons, pas de bistrot, mais la présence chaleureuse de Jim, un retraité amoureux de la solitude qui vient quelques semaines par an tenir le gîte. Il nous laisse aimablement utiliser sa connexion internet.
Quelques balades à terre malgré la pluie.
Il pleut tellement que les cascades naissent spontanément autour de nous, les rivières au bord desquelles on se promenait la veille se transforment en furies charriant des troncs d’arbres et des blocs de pierre…
La température chute soudainement, il fait 5° dehors !
Le calme revenu nous allons vers un très joli mouillage à l’entrée du Doubtfull, qui se révèlera assez fréquenté:
Plusieurs bouées sont là; nous en prenons une; le soir un petit bateau de croisière arrive, nous décrétant très gentiment que c’est sa bouée, qu’il aimerait bien la récupérer… Nous nous amarrons à une autre bouée..Le lendemain soir un autre bateau de croisière arrive : « C’est ma bouée… Mais vous pouvez l’utiliser, je vais me mettre à l’ancre un peu plus loin…Finalement il se met à couple avec nous, une occasion de bavarder avec quelqu’un… ces endroits sont si vides ! Steve nous explique qu’il tourne hiver comme été dans les fjords, en été dans le Doubtfull, en hiver dans le Dusky, il emmène au maximum dix passagers pour une semaine, des amateurs de beaux paysages…
Tout le monde quitte le mouillage très tôt… Les croisiéristes retournent à Deep Cove, nous sortons en mer pour rejoindre le Dusky Sound.
Nous entrons par le Breaksea Sound, du nom de l’ile Break Sea à son entrée, « brise lames », donné par Cook. N’ayant pas eu le temps ou les conditions pour explorer le fjord Cook l’avait surnommé: « Nobody knows what ». Une vingtaine d’années plus tard le Capitaine Georges Vancouver, celui qui a donné son nom à l’ile canadienne, s’aventure dans le fjord et le nomme : »Somebody knows what », et montre la liaison entre le Dusky et le Breaksea.
Relié par le Passage Acheron, il constitue avec le Dusky Sound une vaste zone navigable.
Nombreux ilots sur lesquels on a trouvé des traces de campements laissées par les Maoris qui venaient chasser et pêcher.
En 1894 le naturaliste Richard Henry s’était installé sur l’ilot Pigeon afin de protéger la faune endémique de l’introduction de prédateurs. Actuellement l’ile Resolution est mondialement connue pour un ambitieux programme d’éradiction …
Nous allons vers Third Cove. Quelque archange céleste avec son épée a transpercé l’épaisseur noire des nuages nous laissant un passage vers la lumière.
Nous voici à l’entrée du Dusky Sound, reliefs bas et dégagés. C’est ici que Cook a passé un mois lors de son deuxième voyage dans la région. Cachée dans les buissons une petite plaque commémorative à l’intention des croisiéristes :
En dégageant la végétation Cook fit installer un observatoire pour les astronomes et un atelier de forge, il créa également la première brasserie de Nouvelle Zélande en produisant de la bière à partir de manuka.
Dédale d’ilots protégés, ce fjord aux reliefs moins oppressants offre une atmosphère de nature sauvage, air pur et couleurs éclatantes qui ont laissé plus d’un croire au paradis!
Le soleil revenu y est pour quelque chose…
C’est sur Anchor Island que se trouve la première construction européenne sur le sol néozélandais. Un groupe de chasseurs de phoque y avait été déposé, ils y restèrent un an, construisant un bateau pour repartir…
Nous y rencontrons des pêcheurs,
ils ont une base flottante pas loin :
et un bateau de charter chasse-pêche sympa: on nous offre des langoustes !
Droppés par hélicoptère ils rejoignent ainsi le bateau qui lui ne quitte pas la zone, pour quelques jours de chasse et pêche intense…
Nos premières langoustes des fjords, il était temps! Elles sont délicieuses.. L’endroit s’appelle d’ailleurs Luncheon Cove car l’histoire dit que Cook y fit un repas de langoustes…
Malgré cette soudaine vie sociale l’endroit reste le domaine des otaries :
Une balade en forêt sur Anchor Island nous amène à un lac où nichent des cormorans :
Nous quittons ce dernier fjord en milieu de journée, avec une belle brise d’Ouest qui doit nous amener à Stewart le lendemain matin…
Un ballet d’albatros nous accompagne ; ils nous tournent autour, se posent dans notre sillage, nous survolent à nouveau…
Le regard de l'albatros...